17. novembre 2020, Catégorie: Ecotoxicologie des sols Evaluation des risques
Biomonitoring des produits phytosanitaires en Suisse
Dans le cadre du plan d'action visant à la réduction des risques et à l'utilisation durable des produits phytosanitaires, un système de surveillance est actuellement élaboré pour le suivi des résidus dans les sols agricoles de Suisse. Les principaux éléments en sont la détermination de valeurs guides écotoxicologiques pour les sols et le choix de bioindicateurs adaptés.
En septembre 2017, le Conseil fédéral a adopté un plan d'action visant à la réduction des risques et à l'utilisation durable des produits phytosanitaires (PPh). Ses objectifs sont de réduire de moitié les risques dus aux PPh dans les dix ans à venir et de proposer des alternatives à la protection chimique des cultures et des végétaux. Pour que ces buts soient atteints, de nombreuses mesures ont été décidées. L'une d'elles est de mettre en place un programme de surveillance des résidus de PPh dans les sols agricoles d'ici 2027.
Un travail de pionnier pour déterminer des valeurs guides pour les sols
Dans le cadre de cette mesure, l'Observatoire national des sols (NABO) a élaboré une stratégie de monitoring chimique des résidus de PPh dans les sols pendant que le Centre Ecotox travaillait avec EnviBioSoil à un système de surveillance biologique de longue durée. « Nous voulons quantifier les effets des résidus de PPh sur la qualité du sol », explique Janine Wong, du Centre Ecotox. La stratégie de biosurveillance élaborée prévoit tout d'abord la détermination de valeurs guides écotoxicologiques pour les sols. Il s'agit de seuils de concentrations basés sur les résultats d'études écotoxicologiques menées avec divers organismes édaphiques qui, comme les critères de qualité employés pour le milieu aquatique, peuvent être utilisés pour identifier un risque potentiel pour la faune du sol. Ensuite, divers bioindicateurs doivent être proposés pour étudier les effets des résidus de PPh sur les organismes édaphiques dans les sols agricoles de Suisse.
Dans la première phase du projet, dix substances représentatives sont tout d'abord sélectionnées pour la détermination des valeurs guides en concertation avec les responsables du projet à l'Office fédéral de l'environnement et à l'Office fédéral de l'agriculture. Mais alors que la méthode de détermination des valeurs limites écotoxicologiques est bien établie pour le milieu aquatique, les scientifiques doivent encore défricher le terrain dans le domaine du sol. « Le compartiment édaphique est beaucoup plus complexe : il existe de très nombreux types de sols et les produits phytosanitaires ne sont pas uniquement présents dans l'eau interstitielle mais peuvent également être adsorbés sur les particules du sol. Cela influe sur leur biodisponibilité et sur leur toxicité pour la pédofaune », explique Janine Wong. Les objectifs de protection doivent également être mieux définis pour les sols. Mais il est déjà clair que, comme pour l'appréciation de la qualité des eaux, les scientifiques s'appuieront sur les études déjà publiées sur la toxicité des PPh pour les organismes. Malheureusement, la littérature scientifique est, à ce niveau, bien moins abondante pour les sols que pour les milieux aquatiques.
Quels sont les bioindicateurs les mieux adaptés ?
Le Centre Ecotox va également sélectionner une série de bioindicateurs pouvant être suffisamment sensibles pour les résidus de PPh. Il convient, dans un premier temps, de mener une recherche bibliographique. Ce travail est actuellement en cours. Investiguer les effets sur les lombrics et les microorganismes paraît particulièrement prometteur.
Dans la deuxième phase du projet, il est prévu de tester les bioindicateurs présélectionnés sur le terrain et au laboratoire. Dans les sols agricoles, les organismes biologiques ne sont toutefois pas uniquement exposés aux résidus de manière individuelle mais le plus souvent sous la forme de mélanges complexes de produits phytosanitaires. La méthode à développer doit donc également permettre l'évaluation des mélanges de substances.
Dans une troisième phase, les données du biomonitoring seront finalement combinées à celles de l'évaluation chimique des risques. « D'un côté, nous allons comparer les données du monitoring chimique du NABO, c'est-à-dire les concentrations de produits phytosanitaires mesurées sur le terrain, avec les valeurs guides écotoxicologiques établies pour les sols. D’un autre côté, nous voulons étudier directement les effets des produits phytosanitaires sur les organismes bioindicateurs sur les sites de surveillance du NABO », explique Janine Wong. Cette double approche permettra de mieux quantifier les risques dus aux PPh pour la qualité des sols.